Christian Laval, L’école n’est pas une entreprise, le néo-libéralisme à l’assaut de l’enseignement public, La découverte, Paris 2003
Discours rituel, politique ou véritable interrogation ? Christian Laval en écrivant L’école n’est pas une entreprise, le néo-libéralisme à l’assaut de l’enseignement public a le mérite de situer son propos dès le titre. En s’attaquant à ce thème, l’auteur fait en fait oeuvre politique au sens ou davantage que l’école, c’est le néo-libéralisme qui est en accusation. En mettant en évidence le fait que le néo-libéralisme atteint l’école (comment pourrait-il en être autrement dans une société qui plébiscite assez largement cette orientation ?) l’auteur nous invite à observer dans l’intimité de l’école la manière dont il s’y insinue.
Malheureusement le propos ne sert pas forcément la cause qu’il prétend défendre. En choisissant logiquement ce qui a trait aux TIC et à l’e-learning (p.143-152) je m’aperçois que la technique d’écriture retenue ici ne sert pas vraiment la cause défendue. L’anti-américanisme de base exprimé à travers des exemples choisis est révélateur de l’absence d’analyse de fond des questions. De fait nous vivons dans une économie libérale qui a comme moteur la seule logique économique, or lutter contre ne signifie pas construire des îlots de pureté. L’attaque contre la logique des compétences (« l’essentiel tient en réalité aux considérables intérêts économiques qui transforment l’éducation en marché et l’école en usines à « compétences ». » p. 151) est très réductrice et ne sait pas faire la part de ce que cette logique n’est pas à sens unique. De même l’attaque contre les technologies n’est pas suffisamment étayée (depuis N. Hirtt, peu de choses nouvelles). D’ailleurs l’exemple des tenants des « techniques » Freinet est un coup bas porté à des acteurs de l’éducation qui ont toujours privélégié le quotidien de l’action « réelle » au discours idéologique de ceux qui pensent pour les autres… Car finalement de cet ouvrage on attendait autre chose en matière de force de proposition. Malheureusement les sirènes du passé glorieux ne sont pas encore muettes, et trop souvent elles ressurgissent en oubliant que leur origine était avant tout « révolutionnaire ».
Bruno Devauchelle
Cepec
