23 questions pour le débat national
Le Figaro du 20 octobre donne un premier aperçu sur les documents prévus pour inspirer le débat national sur l’Ecole. Pour Le Figaro, c’est 23 questions qui seront posées les réunions publiques et aussi dans les établissements. A chaque question correspond une fiche qui fait un état des lieux et développe le sujet en plusieurs sous-questions. Le Figaro en publie quelques unes : « quelles sont les valeurs de l’école et comment les conforter dans notre société ? Comment rendre l’école juste ? Comment motiver et faire travailler efficacement les élèves ? Comment prendre en charge les élèves en grandes difficultés ? Quelles doivent être les fonctions et les modalités des examens, de l’évaluation et de la notation des élèves ? ». Pour Le Figaro certaines questions centrales apparaissent au second plan seulement. Murielle Court estime que « rarement le système éducatif aura été à ce point passé à la loupe. Reste à souhaiter que devant l’ampleur de la tâche les Français ne reculeront pas, laissant aux spécialistes le champ libre pour retrouver leurs bons vieux clivages stériles ». Comme si l’école pouvait améliorer son efficacité sans faire appel à ses spécialistes et sans se professionnaliser.
http://www.lefigaro.fr/france/20031020.FIG0126.html
Le diagnostic du HCEE
Le Monde du 10 octobre publie une synthèse du rapport sur l’état de l’école commandé par le ministre au Haut Conseil de l’évaluation de l’école pour alimenter les travaux de la commission Thélot dans le cadre du débat national sur l’Ecole. Le diagnostic porté par le HCEE fait la synthèse de travaux antérieurs, par exemple l’enquête internationale PISA, dont le Café a rendu compte. Il questionne l’efficacité de l’Ecole. Il est le plus sévère au primaire : un élève sur dix ne sait pas lire au CE2 et cela se perpétue en 6ème où 12% des élèves ont des difficultés graves de lecture et 3% sont quasi analphabètes. Pour les auteurs, le redoublement n’apporterait pas une réponse adéquate. Le collège souffre de ruptures trop franches avec l’école et le lycée. Les auteurs recommandent la limitation du nombre des professeurs par la généralisation de la bivalence. Au lycée, ils ont beau jeu de souligner les écarts entre filières. La série L est en déclin rapide (9% des élèves du lycée général) et recueille des élèves qui sont rarement littéraires. La série STT « ne permet ni une insertion professionnelle légère ni une adaptation facile dans l’enseignement supérieur ». Finalement le système échoue à démocratiser l’enseignement. D’une part, depuis 1996, la part des bacheliers dans une génération tend à baisser du fait de la baisse des bacheliers généraux. L’Ecole n’est pas capable de former les personnels qualifiés demandés par l’économie. Pire encore, les inégalités se sont accrues dans l’école : seulement 30% des enfants d’ouvriers font des études post-bac contre 80% des enfants de cadre. Pourtant la France dépense plus pour son école que la plupart des pays développés. Le diagnostic aurait pu être plus sévère, PISA révélant encore d’autres inégalités. Mais, dès maintenant, la question des remèdes est posée. Ainsi dans Le Figaro du 11, Alexis Brézet évoquait « une mise en cause du modèle égalitaire et pédagogiste ». Ce que montre justement PISA, c’est qu’en Europe les systèmes les plus efficaces en terme de rendement global sont ceux qui privilégient l’épanouissement de l’enfant sur la performance (par exemple les pays nordiques). Ce sont également ceux qui arrivent à lutter le plus efficacement contre les inégalités sociales.
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3226,36-337494,0.html
http://www.lefigaro.fr/debats/20031011.FIGEDIT.html
http://www.oecd.org/document/52/0,2340,fr_2649_37455_13634484_1_1_1_37455,00.html
L’état de l’école 2003
Chaque année, le ministère publie une nouvelle édition de son annuel « L’état de l’école ». L’édition 2003 confirme les évolutions de ces dernières années. S’agissant des dépenses d’éducation, l’année 2002 marque un palier dans une baisse tendancielle des dépenses d’éducation dans le PIB passées de 7,4% en 1993 à 6,9% en 2002, ce taux restant supérieur à celui des années 1970 et 1980. La France se situe sensiblement au dessus de la moyenne des pays de l’OCDE, mais derrière la Corée du sud, les Etats-Unis et la Suède. A prix constants, la dépense d’éducation a doublé depuis 1975. Cela résulte pas tant d’une hausse du nombre d’élèves que d’une augmentation des dépenses par élève qui se situent actuellement à 8120 euros dans le secondaire et 4460 dans le primaire. L’état de l’école met l’accent sur les points faibles du système éducatif. Ainsi le taux de scolarisation, après avoir connu une nette hausse, est en baisse depuis 1996. 94.000 jeunes sortent encore du système éducatif sans aucun diplôme. C’est 15.000 de moins qu’en 1995 mais c’est encore beaucoup, d’autant que le nombre de bachelier a sensiblement reculé depuis 2000. De toutes les catégories sociales celle des enseignants se distingue par le fort accès au bac général de ses enfants : 80% des enfants de profs sont bacheliers généraux contre 73% des enfants de cadres et 15% des enfants d’ouvrier non-qualifié. Le système est aussi injuste envers les filles : si elles obtiennent globalement de meilleurs résultats que les garçons, elles restent minoritaires en séries scientifique et industrielle. Enfin les résultats en lecture des jeunes français, tirés de l’enquête PIRLS, restent assez faibles : 425 points pour la France alors que la moyenne générale est à 500 et le score des Etats-Unis à 542. L’école garde son utilité face au chômage et pour obtenir une rémunération élevée : en début de carrière, le salaire moyen d’un diplômé du supérieur se situe à 1800 euros, celui d’un sans-diplôme à 490.
http://www.education.gouv.fr/stateval/etat/etat.htm
Réactions syndicales et politiques
L’UNSA A&I veut saboter le débat national
Selon l’AFP, choqué par une phrase d’une des 22 fiches élaborées par la commission Thélot, l’UNSA Administration et intendance appelle ses adhérents à refuser leur concours à ce débat.
http://actu.voila.fr/Depeche/depeche_emploi_031022102430.ro2t1hsu.html
Scolarité obligatoire jusqu’à 18 ans ?
Selon Le Monde du 21 octobre, dans une brochure sur le débat national sur l’école, le SNES suggère de porter la scolarité obligatoire de 16 à 18 ans et d’augmenter de deux points la part du PIB consacrée à l’éducation. De son côté, le SGEN CFDT approuve le maintien du collège unique et les diagnostics recommandé dans l’avis du HCEE mais critique certains éléments du rapport des experts.
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3226,36-338917,0.html
http://www.sgen-cfdt.org
Campagne de l’UMP sur l’école
« L’avenir de l’école et la formation des élèves sont une priorité pour la nation et l’UMP ». Le parti majoritaire annonce le lancement à compter de la mi-octobre de forums dans chaque département. Ils seront suivis d’une large consultation nationale qui recueillera les avis des sympathisants. L’UMP fera ensuite des propositions au gouvernement.
http://www.u-m-p.org
Travail et uniforme…
L’école uniforme
La disparition du service national aurait pu faire oublier les charmes de l’uniforme. C’est à l’école qu’il pourrait réapparaître. Interrogé sur LCI, Xavier Darcos a déclaré que « la question mérite d’être posée ». Le ministre est entré dans les détails précisant son opposition aux rangers et au string. Pour l’AFP, qui rapporte ces propos, « l’uniforme pour les écoliers, la règle en Asie et en Afrique, n’est imposé nulle part en Europe, pas même en Grande-Bretagne où l’usage en est cependant quasiment généralisé ». L’AFP relève que l’uniforme reste en Europe « l’apanage du privé ». Loin de gommer les différences sociales, en Europe comme en Afrique, l’uniforme fait la différence.
http://actu.voila.fr/Depeche/depeche_emploi_031009144230.kgnl1q5p.html
http://actu.voila.fr/Depeche/depeche_emploi_031009073520.zsgdxvp1.html
Des réactions uniformes
La presse se fait l’écho des propos de X. Darcos en faveur du port de l’uniforme à l’école. Dans Libération du 10 octobre, Emmanuel Davidenkoff évoque « la tentation réac » du ministre.. et la contradiction que lui a apporté Luc Ferry estimant que « le retour à la plume Sergent-major affaiblirait l’idée républicaine ». Il est vrai que personne n’avait encore sorti cette idée de sa trousse. Le Figaro relève que « la question soulève plus d’oppositions qu’elle ne suscite d’approbations ». Le quotidien recueille un avis favorable : celui du député UMP F. Baroin : « parler d’uniforme conduit à examiner les pressions consuméristes et communautaristes ». A l’inverse, pour une responsable du SNES, « les problèmes sociaux ne s’arrêtent pas aux portes de l’école et les masquer ne sert à rien ». Georges Dupon-Lahitte,président de la FCPE, estime qu’il « vaut mieux travailler sur ce que doivent être la tenue et les règles de correction. Si l’uniforme était une solution, ça se saurait ».
http://www.lefigaro.fr/france/20031010.FIG0251.html
http://www.lefigaro.fr/france/20031010.FIG0250.html
Le travail, valeur refuge de Luc Ferry
« Rien ne réussira sans une réhabilitation de la valeur travail ». Dans Le Monde du 14 octobre, Luc Ferry réhabilite avec vigueur le travail. « Que l’élève doive être au cœur de notre école va de soi. Mais cette vérité basique, pour ne pas dire ce truisme, ne signifie ni que l’on doive confondre l’éducation avec un jeu, ni que l’on renonce à l’exercice d’une certaine autorité… Dès l’origine, la naissance de nos systèmes scolaires modernes fut associée à l’idée d’une pédagogie du travail et des « méthodes actives ». Elle a de part en part accompagné l’émergence de l’idée républicaine… Comment respecter la liberté de l’enfant tout en lui enseignant une discipline ? Réponse : par le travail. C’est lui qui fournit le « concept synthétique », la solution de cette opposition frontale entre le jeu et le dressage. Car, en travaillant, l’enfant exerce sa liberté, mais il se heurte néanmoins à des obstacles réels, objectifs, qui, lorsqu’ils sont bien choisis par le maître, peuvent se montrer formateurs pour lui dès lors qu’il parvient à les surmonter activement. A l’anarchie du jeu et à l’absolutisme du dressage succède ainsi le « républicanisme » du travail : le citoyen, en effet, est celui qui est libre lorsqu’il vote la loi, et contraint cependant par cette même loi dès lors qu’il l’a approuvée – où l’on retrouve les deux moments, liberté et discipline, activité et passivité, que le travail réconcilie en lui ». Des propos qui restent dans la continuité de sa « Lettre à tous ceux qui aiment l’école ». Ainsi , pour le ministre « il existe ainsi un lien intime, d’une profondeur insoupçonnée, entre l’idée républicaine qui fonde l’école moderne et la valeur travail ».
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3232,36-337946,0.html