La seconde heure supplémentaire obligatoire à la rentrée 2019
Les enseignants peuvent toujours défiler, le ministre avance. Le Journal officiel du 13 avril publie une des mesures décidées par JM Blanquer les plus critiquées : la création d'une seconde heure supplémentaire obligatoire pour les enseignants du second degré. Cette mesure permet -elle vraiment d'améliorer le pouvoir d'achat des enseignants ? POurquoi beaucoup d'enseignants lui sont-ils hostiles ?
Le décret publié au JO
" Au III de l'article 4 du décret du 20 août 2014 susvisé, les mots : « une heure supplémentaire hebdomadaire » sont remplacés par les mots : « deux heures supplémentaires hebdomadaires »". Un décret, publié au Journal officiel du 13 avril, fait entrer en application au 1er septembre 2019 la seconde heure supplémentaire obligatoire pour les enseignants du 2d degré. Ainsi est modifiée une décision de Claude Allègre. Car c'est à lui que l'on doit le passage de deux heures supplémentaires obligatoires à une seule. C'était en 1999.
Une bonne affaire pour les enseignants ou le ministre ?
Lé décret ministériel était attendu. Le 19 décembre 2018, le ministre de l'éducation nationale annonçait "la transformation de 2085 ETP en heures supplémentaires" dans le second degré, ajoutant que cela "contribuera à renforcer le pouvoir d’achat des professeurs". Les heures supplémentaires étaient donc à la fois présentées comme un remède aux suppressions massives de postes et comme une politique sociale permettant de revaloriser les salaires.
Cette présentation est-elle sincère ? La Cour des comptes, dans un rapport sur la gestion des enseignants d'octobre 2017 dont on mesure aujourd'hui la portée, recommande le doublement des heures supplémentaires pour alléger le budget de l'éducation nationale.
La Cour calcule que "chaque heure de travail à temps plein d'un enseignant titulaire coûte environ 75% de plus qu'une heure supplémentaire. Elle évalue l'économie réalisée par l'imposition d'une heure supplémentaire à 470 millions d'euros et 26 000 postes.
Cela dans la perspective où tous les enseignants effectueraient cette heure. En réalité, la mesure Blanquer n'aura pas tant d'effet car, selon une étude Depp, 73% des enseignants du second degré effectuent déjà 2 heures supplémentaires. Le gain se limitera donc à 117 millions et 6500 postes. Mais la mesure est surtout une source d'économie pour le ministère . Beaucoup plus qu'un moyen d'améliorer le niveau de vie des enseignants.
Heures sup et inégalités
La mesure va aussi croiser les inégalités entre les enseignants. Car tous les enseignants du second degré ne sont pas égaux devant les heures supplémentaires. Leur volume est étroitement lié aux corps d'appartenance. Ainsi 89% des professeurs de CPGE effectuent en moyenne 4 heures supplémentaires hebdomadaires. Pour un professeur de chaire supérieure cela rapporte 1892 € par mois sur un salaire moyen de 5560 €. 86% des agrégés effectuent des heures supplémentaires, en moyenne 3 par semaine et cela représente 467€ dans un salaire moyen de 3464 €. Chez les certifiés , 73% des enseignants effectuent des HSA , en moyenne 2 par semaine. Cela représente 182€ par mois sur un salaire moyen de 2560 €. Pour les PLP ont trouve 72% des enseignants pour 216€ sur 2690€ de salaire moyen.
La répartition des HSA est inégale à l'intérieur de chaque corps. Ainsi les enseignantes du second degré effectuent nettement moins d'heures, sans doute car elles ont davantage de charges familiales. Les jeunes enseignants, qui doivent déjà préparer beaucoup de cours, en font moins que les plus expérimentés.
Pour ces catégories le décret ministériel va rendre la vie de ces enseignants un peu plus difficile. Pour tous, il est surtout un moyen de pouvoir supprimer des postes et de réaliser des économies sur le travail des enseignants.
François Jarraud
Que sait-on des heures supplémentaires ?
Le rapport de la Cour des comptes
Sur la création de la 2de heure
Par fjarraud , le lundi 15 avril 2019.